Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
l'Extincteur
Archives
l'Extincteur
25 février 2008

Ma mère (2)

Loin de moi l'idée de ne faire que des articles déprimants, mais j'ai un besoin fou de me plaindre en ce moment. Comme ça fait plutôt du bien, je continue donc.

Ma sacrée mère. Depuis quelques temps je me bats contre son ombre, tout le temps. J'ai l'horrible tendance de reproduire tous les trucs minables qu'elle a pu m'apprendre, et chaque petite chose refaite est une nouvelle honte personnelle. Il y a eu le fait d'"investir" mon lieu (ma chambre), qui a été extrêmement difficile. Sans l'aide de N, j'aurais continué à la haïr, il y aurait pas eu de meubles à l'intérieur, tout aurait été encombré, moche, poussiéreux, et tellement bordélique qu'on aurait pas pu poser un pied par terre. Là, c'est mieux.
Il y a le problème du désir masculin, toujours pas résolu. Je pense aussi que je le tiens d'elle, au moins en partie. Mon avantage ici, c'est que pour le moment, je me démerde mieux qu'elle: après tout, j'ai un mec, pas un con en plus, et mes potes en général sont aussi des mecs. Ouf.
Et il y a à présent le problème du travail. J'ai pas envie de finir comme elle, de me taper dix ans de RMI. J'ai pas envie de me faire jeter systématiquement de tous les emplois auxquels je postule, j'ai pas envie d'avoir si peu de sens commun que tout le monde me prend pour une barge; j'ai pas envie de manquer de thunes toute ma vie, pas envie d'être à charge de l'Etat non plus, parce que c'est pas franchement une preuve de réussite personnelle. Il faut donc travailler.
Et je sais pas si c'est la conséquence de l'avoir entendue se plaindre de tous ses patrons, de l'avoir vue de milliers de fois rentrer en pleurs parce que ça se passait mal, ou si c'est simplement parce que je me sens indigne et invendable, mais le travail me terrifie. R a appelé son oncle qui bosse à Carrefour, et même si j'ai pas encore pu lui parler, il semblerait que peut-être, je pourrais taffer là-bas. J'ai peur. Je déteste avoir peur mais j'ai peur quand même. J'ai une peur panique de ne pas arriver à suivre des horaires réguliers, j'ai peur de l'effort physique (et si je me mets à trembler des 4 membres je fais quoi? et si j'ai des coups de chaud, des vertiges?), j'ai peur des éventuels collègues, j'ai peur de faire des bourdes stupides (tout à fait mon genre quand je flippe), j'ai peur d'être trop bête pour ne pas arriver à faire de la mise en rayon, j'ai peur/pas envie qu'on me demande d'enlever un ou deux piercings (ce serait tout à fait possible), peur du regard des autres, peur, peur, peur, peur, peur. Pour faire taire toute cette partie inconstructive de moi-même, j'essaie la bonne vieille technique du matraquage cognitif. J'essaie de penser salaire, shopping, cadeaux à mon mec, sentiment d'utilité, sentiment de victoire (si victoire il y a), sentiment d'obligation (si je suis pistonnée, mieux vaut encore plus éviter les caprices), sans parler du fait que je dois environ 200€ à ma psy, que je pourrais être indépendante financièrement, noter un nouveau truc sur mon CV, etc. Je devrais imprimer ce que je viens de dire et le coller sur tous les murs de mon apparte, franchement. J'ai envie de réussir.




Ma mère, quand elle l'a su, a tout de suite attaqué avec son refrain "je casse mais c'est pour ton bien". Elle a eu un grand soupir, et a commencé à me dire à quel point Carrefour étaient des bâtards, des sales types de droite qui exploitent les petits jeunes sans aucune sécurité et blablabla. Je l'ai coupée direct. J'angoisse déjà suffisamment, pas la peine d'en rajouter. Merci pour les encouragements, les éventuelles félicitations, oui merci maman.

-Faudrait vraiment que je garde en tête que l'avis de ma mère a presque jamais rien d'objectif. De toute façon, elle casse tout le monde. Surtout moi. Plus elle aime les gens, plus elle les dévalorise, parce que vous comprenez, ils ne sont pas parfaits. Moi étant par conséquent l'une des plus aimées, je suis aussi la plus imparfaite et la plus à rectifier. Des fois, je me demande honnêtement si les avis de ma mère sur certaines choses seraient pas limite délirants. C'est peut-être salaud, ce que je dis, mais quand j'y repense, il y  a tellement de choses qu'elle affirme et qui sont fausses, ou complètement tordues, que ça ne m'étonnerait même pas vraiment. Je pense par exemple à son comportement chez elle, elle a l'habitude de (oh bon sang, comment est-ce que je peux dire ça sur un blog, hein? j'ai l'impression d'atteindre le summum de la débilité ou de la déloyauté familiale) de découper en morceaux tous les papiers administratifs qu'elle doit jeter, parce qu'elle craint que les gens qui trient les poubelles tombent dessus et s'en servent pour lui faire des appels anonymes. Par exemple. [c'est horrible, je suis une mauvaise fille] Ou comme sa manie de garder des choses qui n'ont plus aucune valeur, comme ses notes de cours de quand elle était au lycée, au cas où ça lui serve un jour, ainsi que tous les journaux/magazines qui lui passent sous la main. C'est comme si tous ces papiers qu'elle garde précieusement (et qu'elle offre parfois comme des cadeaux) lui conféraient une sorte de pouvoir, de sagesse. Si on lui pose une question qui lui rappelle une de ses lectures, elle va aller farfouiller trois jours dans son merdier pour vous ressortir LE papier en question.

Avec le recul, il y a tellement de choses qui me paraissent dingues chez elle, c'est incroyable. La première fois que je m'en suis véritablement rendu compte, je crois que ça a été à ma première hospitalisation. On lui avait demandé de m'amener des affaires de rechange et de toilette, et tout ce qu'elle avait pris, franchement, c'était presque inutile, ou à côté de la plaque. Elle m'avait pris un peignoir, des sous-vêtements dont je me servais plus depuis un sacré bail; pas de brosse à dents, pas de serviette de toilette. Deux mois plus tard, pour mon déménagement, elle avait rassemblé dans ma chambre tout ce qui lui semblait nécessaire à mon nouvel apparte. Ce coup-ci, il y avait un peu plus de trucs utiles, mais il y avait aussi des choses qu'elle avait décrétées "à moi" depuis mon enfance, tel que une tente, des tournevis, de vieilles boîtes, etc.

ça m'énerve. J'ai beau parler d'elle, je me sens toujours aussi incapable de définir ma mère. Quand j'étais à l'hosto, je me sentais parfois tellement conne. On parlait de ce qui nous avait amené là, avec les autres, et j'entendais viols, maltraitances, mari violent, alcoolisme, asiles psychiatriques, des trucs parfaitement compréhensibles avec des mots, et qui remplissent l'imaginaire collectif de visions d'horreur suprême, et moi j'avais rien. Enfin, j'avais les même symptômes que des filles qui avaient subi des violences physiques, mais tout ce que j'arrivais à dire, c'est que je m'entendais pas avec ma mère. Quoi de plus normal pour une ado? Je trouvais pas le problème juste, le truc à dire qui ferait comprendre le topo à tout le monde. D'ailleurs je savais même pas ce qui clochait vraiment. Elle n'était ni véritablement envahissante (je faisais un peu ce que je voulais), ni complètement démissionnaire (j'ai tout de même eu une certaine base d'éducation); elle n'était pas alcoolique, pas droguée; on ne se tapait pas sur la gueule, on ne s'insultait pas (ou presque); et j'avais un toit et à manger.
C'est en parlant avec des infirmiers, et ma psy, que j'ai fini par capter que ma mère était pas si nette que ça. Y a par exemple les mots "inceste moral", "cruauté", "maltraitance psychiques", "folie", "confusion du corps entre la mère et la fille" qui m'ont fait un drôle d'effet. Je sais toujours pas s'ils s'appliquent vraiment ou si certains ont exagéré. ...
J'ai beau réfléchir, je sais pas.

Publicité
Commentaires
M
:)
F
Moi aussi j'ai tendance à garder beaucoup les papiers, prospectus, magasines...ça me rassure, en fait. C'est bizarre de dire que l'on est rassuré par du papier, hein.<br /> Moi aussi quand j'ai commencé à avoir des problèmes il y a eu des questions qui se sont posées parce que je n'ai jamais été maltraitée, mes parents ne sont pas divorcés, ils s'entendent bien, moi ça allait à peu près à l'école...<br /> Mais bon, je suppose qu'il n'y a pas de "bonne" raison pour se sentir mal.
X
oui, je suis d'accord avec vous deux. Lutinette, je sais pas si c'est ça l'explication ou pas, mais je pense qu'on saura jamais... c'est à elle de le trouver mais pour le moment elle trouve ça vraiment normal lol. Je crains d'avoir été terriblement pessimiste dans mon article, j'aurais dû préciser quand même que depuis l'hosto, notre relation a vachement évolué, puisqu'on arrive à avoir de véritables conversations une fois de temps en temps. Y a encore des fois où elle m'énerve prodigieusement, mais dans l'ensemble, elle bouge petit à petit - et moi aussi. MomoInZeWood, entièrement d'accord avec toi, quand une mère (ou un père) décide de vraiment se planter avec ses enfants ça dégénère vite. Dommage qu'ils ne pensent pas tous à régler leurs propres problèmes avant de décider de procréer, hein... <br /> (enfin l'avantage c'est que nous les enfants quand on s'en sort on devient plus forts et plus intelligents :)
M
C'est con à dire mais, les mères ne peuvent pas faire beaucoup de "vraies" bourdes.<br /> Par contre, les rares qu'elles peuvent faire nous empêchent d'avoir une enfance normale, des bases solides pour grandir et avoir confiance en soi...<br /> <br /> Merci maman...
L
dis toi que je me sens encore plus bete, mes pauvres parents ne m'ont jamais maltraitée et cie mais des fois on ne pas savoir explicitement d'où vient notre mal être... ta maman et ses manies de tout découper pour pas qu'on puisse l'appeler etc, ça me rappelle qqun que je connais.. peut être est ce un moyen pour elle de se rassurer, de contrôler ce qui l'entoure? je sais pas, je veux surtout pas faire de la psycho à deux balles!!! et puis je me dis que ca doit pas être facile d'être tjs en conflit ac sa mere... mais bon au moins ça prouve qu'il y a un lien fort entre vous ,j'espère qu'ac le temps ça pourra évoluer pour vous deux !
l'Extincteur
Publicité
Publicité